Un tamponnement près de Dax - 2 morts et 17 blessés.
Un terrible accident de chemin de fer s'est produit ce matin entre Puyoô et Misson-Habas. L'express 516 est entré en collision avec le train omnibus 301 ; on compte 2 morts et de nombreux blessés. Voici comment s'est produite cette catastrophe, dont le mécanicien Viallard, du 516, arrivé cet après-midi à Bordeaux, a fait le dramatique récit :
Mon train venait de quitter Dax avec vingt-deux minutes de retard, et, désireux de regagner un peu de terrain, j'accélérais mon allure dans la limite des règlements. Un kilomètre environ avant Misson-Habas, où le rapide ne s'arrête pas, je devais faire du 85 à l'heure.
Après cette gare, se trouve un tunnel suivi d'une déclivité de terrain très rapide. A maintes reprises, lorsque je me suis trouvé en service sur cette ligne et que mon train avait éprouvé du retard, je profitais de cette pente très accusée pour faire de la vitesse et rattraper le temps perdu. Il faut croire que l'on a, quelquefois, dans la vie de sinistres pressentiments, car je ne sais pour quelle raison j'ai brusquement fermé mon régulateur en arrivant à la descente, et j'ai enrayé, dans une très grande proportion, l'allure de mon convoi.
Je ne devais marcher qu'à 60 kilomètres à l'heure environ ; tout allait bien et nous approchions de Puyoô. Cinq mille mètres nous en séparaient encore, lorsque mon chauffeur, M. Blanc, qui venait de jeter un coup d'œil sur la voie pendant que je consultais mes manomètres, se jeta sur moi et me cria avec un accent terrible : Nous sommes f..., voilà un train qui vient sur nous !
Je me précipitai vers la lunette, et je vis en effet, à six cents mètres de moi, le 301 qui grimpait la côte sur laquelle je dévalais. La voie est unique à cet endroit, et je ne pouvais avoir aucun doute. Mon parti fut vite pris ; je bondis sur mes leviers, la vapeur fut renversée et mes freins s'abaissèrent avec énergie sur les roues. Vous comprendrez facilement la commotion brusque qu'éprouvèrent les voyageurs et nous-mêmes, après une telle manœuvre ; je ne pus cependant parvenir à arrêter net mon train, qui patina encore sur plusieurs centaines de mètres.
Voyant le grand danger que je courais, je n'eus pas une seconde d'hésitation, et quelques secondes avant le choc je me jetai sur la voie en même temps que mon chauffeur. Nous fîmes bien, car nous aurions tous deux infailliblement péri. Figurez-vous les deux locomotives englouties littéralement l'une dans l'autre, le tender de la mienne entré entièrement dans la chaudière ; bref, un spectacle affreux auquel s'ajouta encore, pour moi, la peine de voir tuer mon infortuné camarade Cuadelot, le mécanicien du 301. Le pauvre garçon n'eut sans doute pas le temps de se reconnaître. Je l'ai vu, sur sa machine, la tête horriblement broyée. Fort heureusement, son chauffeur a eu le temps d'imiter notre mouvement et a sauté sur le talus avant la collision. (...)
Les premiers secours furent promptement organisés. M. Catalogne, sénateur des Basses-Pyrénées, qui se trouvait dans l'un des convois, descendit sur la voie, recommanda aux voyageurs affolés de conserver tout leur calme, et se rendant compte de l'importance de la catastrophe, courut à pied jusqu'à la gare de Puyoô pour faire organiser un train de secours. Bientôt après les médecins de Dax et quelques-uns de leurs collègues qui voyageaient dans les deux trains se mirent à la recherche des victimes ; les blessés geignaient lamentablement. Dans un compartiment de première classe, une dame appelait son mari et sa fille ; un homme pris sous le tender suppliait qu'on l'achevât, et tandis que les uns s'organisaient, que l'on retirait un mort, deux morts, une foule énorme accourrait de toutes parts.
Le cadavre de Cuadelot, l'infortuné mécanicien du train 301, fut retiré le premier. Le malheureux a dû mourir sur le coup et fut victime de son dévouement, car son chauffeur Raffel qui sauta du train et qui eut la vie sauve, lui cria : « Sautons ! » Mais Cuadelot ne sauta point.
Ce fut ensuite le cadavre du capitaine en retraite Sisson, chevalier de la légion d'honneur qui est mort étouffé, car le tender est entré dans le compartiment où il se trouvait. Mme Sisson, femme de lettres, fut trouvée mourante à ses cotés et dégagée après mille efforts. Son état est désespéré.
Parmi les voyageurs du train 516 se trouvaient Orville Wright, l'aviateur américain, et sa sœur, Mme Hart O'Berg. Ni l'un ni l'autre n'ont été blessés. Les voyageurs qui se rendaient à Pau sont arrivés dans cette ville à midi. Wilburg Wright les attendait à la gare, très anxieux de savoir s'ils avaient échappé à la catastrophe.
Le Petit Parisien - 17 janvier 1909 |
Commentaires
1 limoges Le 24/06/2012
2 Dupuy myriam Le 22/08/2010
Réponse : désolé, mais je n'ai pas d'image de Mimbaste-Tram ...